Longtemps cantonnées aux hanches, les boucles de ceinture ont changé de territoire. Aujourd’hui, elles s’imposent un peu partout sur la silhouette. Prada en a fait le cœur d’un de ses derniers sacs, et sur les podiums comme dans la rue, elles s’accrochent partout, transformant un détail fonctionnel en signature mode.
Un détail qui persiste depuis plusieurs saisons
Cet hiver encore, la boucle souvent décorative reste présente, notamment sur les combat boots à boucles, devenues incontournables. On les a vues massivement sur les podiums Printemps-Été 2025 chez Ganni, Ann Demeulemeester et Knwls. Côté labels émergents, Samira Camoscio aux chaussures et Sierra Rena aux sacs en ont fait même un point focal de leurs créations.


Mais cette tendance n’est pas née la saison dernière. Avant d’être le fantasme de toutes les utilisatrices de Pinterest, la botte à boucles appartenait surtout à un vestiaire alternatif. Le modèle Pirate de Vivienne Westwood, créé en 1981, en est l’exemple le plus emblématique : une botte subversive, punk, portée comme un manifeste.
Il faudra attendre les années 2010 pour qu’elle atterrisse aux pieds des it-girls, de Kate Moss à Sienna Miller. Aujourd’hui, sa cote explose sur le marché de la seconde main, preuve qu’une boucle bien placée traverse les décennies.
Habiller des accessoires
Clin d’œil d’autant plus appuyé que son nom l’annonce sans détour : le sac « Buckle » de Prada. Ici, la boucle ne se contente plus de fermer ou d’orner ; elle devient l’élément central autour duquel toute la ligne « Buckle » s’organise. Prada transforme ainsi un mécanisme fonctionnel en un symbole quasi totémique.


Côté vêtements, la créatrice Jeanne Friot pousse encore plus loin cette exploration. Pour la collection Printemps-Été 2026, la Français a pensé une robe bustier conçue à partir de ceintures. Ici, la boucle n’est plus un apparat ni un simple détail décoratif : elle devient la charpente même de la pièce. Fixée, multipliée, ajustée, elle structure la silhouette, remplace les coutures, redéfinit les lignes du vêtement. Friot revendique également une démarche d’upcycling, en réutilisant d’anciennes ceintures pour donner naissance à de nouvelles formes. L’accessoire d’hier devient la matière brute d’aujourd’hui. Le jeu sur la « boucle » atteint ici son paroxysme : on boucle littéralement la boucle. Mais surtout, elle propose une réflexion contemporaine sur la manière de créer, en transformant un symbole d’attache en un acte de liberté créative.
D’abord élément d’ornementation, la boucle est devenue une matière première, un outil pour repenser la fonctionnalité et même la silhouette. On la retrouve désormais détournée, démultipliée : elle ferme, elle relie, elle soutient, mais elle sculpte aussi.
Aujourd’hui, la boucle dépasse largement son rôle initial d’accessoire fonctionnel. Sur les chaussures, elle définit le style ; sur les bottes, elle impose une attitude ; sur les sacs et les vêtements, elle devient pièce maîtresse. L’hiver 2025 le confirme : la boucle est partout, et surtout, elle ne se contente plus de ceindre la taille — elle termine la silhouette.
Comment s’approprier ce détournement ?
En s’affranchissant de son rôle d’attache, la boucle libère la silhouette. Elle ne ferme plus : elle ouvre de nouvelles façons de s’habiller.
Avec les combat boots à boucles, s’offrent deux approches diamétralement opposées — et c’est précisément ce qui les rend si intéressantes. Première option : embrasser l’héritage rock et alternatif. On les associe à un jean skinny noir, une veste militaire ou un perfecto. La silhouette respire la détermination, le caractère. On joue le rôle, mais on le modernise. Deuxième option : renverser totalement le registre punk. Les bottes lourdes et structurées créent du contraste avec un vestiaire bohème. On vise des robes fluides, des matières naturelles, des beiges, blancs cassés, marrons clairs, des coupes amples qui glissent autour du corps. La rigidité de la chaussure dialogue avec la douceur du vêtement.

Les chaussures à talons aiguilles avec boucles imposent un autre type de silhouette. Pour éviter une allure trop « habillée », on les associe à des pièces streetwear. La combinaison parfaite : un jeans baggy en toile brute, taille basse, et un bomber court. Le résultat ? Une silhouette inspirée de Veneda Carter, qui maîtrise à la perfection cet équilibre. Les boucles apportent une touche métallique, presque bijou, qui contraste avec le denim brut et le nylon du bomber.
Aujourd’hui, la boucle dépasse largement son rôle fonctionnel. Qu’elle structure une robe, sculpte une botte ou transforme un sac en pièce iconique, elle brouille les frontières entre accessoire, détail décoratif et élément central de la silhouette. En 2025, la boucle n’est plus seulement à la ceinture : elle boucle le style, au propre comme au figuré.
Article de Julie Boone.








